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«La
raison pure, qui ne saurait être bornée,
est la divinité elle-même».
Ainsi commence La vie de Jésus (1795)
que Hegel, âgé de vingt-cinq ans, composa
alors qu’il était précepteur
à Berne. Ce texte, en toute apparence complet,
constitue un petit livre resté inédit
du vivant de son auteur. Il fut retrouvé
dans ses papiers à sa succession.
La figure hégélienne de Jésus,
dans la ligne de celle de Reimarus (dont la Vie
de Jésus fut également publiée
de manière posthume, par Lessing), se trouve
soustraite à toute dimension qui aurait trait
au miraculeux et au surnaturel. Ainsi, la résurrection
du corps du Christ, pilier essentiel de la foi chrétienne,
se trouve gommée – point qui restera
d’ailleurs constant chez Hegel, jusque dans
les Leçons de Berlin à la fin de sa
vie. Mais cette absence de surnaturel, pour Hegel
qui fait alors de Jésus un porte parole de
la morale kantienne, est en même temps liée
à la condamnation d’une existence qui
resterait simplement naturelle et ne saurait s’élever
au dessus des inclinations sensibles.
Cet opuscule, marqué par la morale kantienne,
est un moment essentiel dans le parcours du jeune
Hegel qui apparaît déjà tiraillé
entre des exigences contraires (rationalistes et
romantiques), ce dont témoignent les autres
documents traduits dans ce volume. |