Bronislaw Geremek,
Ancien Ministre polonais des Affaires étrangères,
Professeur titutlaire de la chaire de civilisation européenne
au Collège européen de Natolin
«Il me semble cependant nécessaire
que la culture, l'éducation et la science ne soient
pas absentes de notre débat européen, sinon
nous serons incapables de construire l'Europe. »
Allocution de clôture du Colloque organisé
par
le Centre d’étude de l’Europe médiane
de l’INALCO et
l’Ambassade de la République de Pologne en France
le 06 décembre 2002
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Lire
un extrait de:
La France et la Pologne au-delà des stéréotypes,
Institut d‘Études Slaves, Paris, 2004, pp.133-134
« En Pologne, on a lancé ces dernières
semaines le postulat de créer dans l'Union européenne
un quatrième « pilier», celui de l'éducation,
de la science et de la culture. Je ne suis pas partisan du
langage européen divisant en piliers l'architecture
européenne, mais je crois que le sens de cette proposition
est très important.
Nous sommes au cours des négociations sur l'entrée
dans l'UE, on parle des oeufs, des bananes, du blé,
mais on ne parle jamais de culture, d'éducation. Et
puis vient cette question banale qu'on pose sans cesse: «Qu'est-ce
que la Pologne apporte à l'UE?». Je devrais répondre
en disant «Pas trop de lait», parce que c'est
de cela dont on a peur. Mais, nous apportons à l'Union
la jeunesse, une jeunesse qui pense en termes européens,
et à mon avis c'est un apport qui est incomparablement
supérieur à tout ce qu'on peut entendre dans
les négociations institutionnelles. Le problème
des manuels scolaires devrait aussi devenir un des grands
sujets de coopération européenne. Ce ne sont
pas seulement les Français qui ont de l'expérience,
nous aussi, nous avons une bonne expérience du travail
sur les manuels, ceux d'histoire en particulier, avec les
Allemands mais aussi avec les Ukrainiens et avec d'autres
voisins. C'est une expérience qui a très bien
servi le dialogue à trois, entre la France, l'Allemagne
et la Pologne.
Il faudrait voir cette ouverture vers les problèmes
de connaissance et d'éducation, non pas comme un nouveau
« pilier », mais surtout comme une politique de
solidarité qui devrait être le ciment de l'UE.
Sans politique de solidarité, il n'y aura pas de communauté
européenne. À côté de la politique
agricole commune, de la politique de cohésion, de la
politique de la main-d'oeuvre, il devrait y avoir une politique
de l'éducation. Je parle de la politique éducative
parce que je sais très bien qu'il y a des problèmes
et que tous les domaines de la culture et de la science devraient
en vertu du principe de subsidiarité ne plus rester
réservés au domaine de la politique nationale.
Je le comprends, mais je comprends aussi qu'il existe une
certaine crainte que cette façon de parler fait naître.
Mais il me semble cependant nécessaire que la culture,
l'éducation et la science ne soient pas absentes de
notre débat européen, sinon nous serons incapables
de construire l'Europe. »
Bronislaw GEREMEK,
Clôture de la conférence
La France et la Pologne au-delà des stéréotypes,
Institut d‘Études Slaves, Paris, 2004, pp.133-134
Textes réunis par Maria Delaperrière,
Joanna Doberszyc, Bruno Drweski
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