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M O N D A L I S A T I O N
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Mondialisation
et civilisations :
quelles valeurs pour le XXIe siècle?
Conférence
donnée au SEL
par André Comte-Sponville
Soirées Philo
du 08/02/05, à 20h45.
Nous
remercions M. Alain Michaud, Directeur du SEL,
d'avoir bien voulu nous accueillir gracieuseument
pour cette conférence-débat dans
la grande salle du SEL.
Nous remercions le service de presse de la
Ville de Sèvres
d'avoir autorisé la reproduction, ici,
de photos prises
par M. William Goëta.
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André
Comte-Sponville, Alain Michaud, Czeslaw Michalewski. |
La Soirée
Philo du 08 février 2005, sur la mondialisation
et les valeurs, a réuni au SEL quelques 270-300
personnes.
Compte-rendu de la conférence, par Marie-Anne
Amar, Prof. de Sciences Economiques
et Sociales au lycée de Sèvres.
À lire : A. Comte-Sponville, Le
capitalisme est-il moral?
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Mondialisation et civilisations :
quelles valeurs pour le XXIème siècle?
Toutes les civilisations se valent-elles dans notre monde mondialisé
? Et comment choisir nos valeurs aujourd’hui ? Voici en
quelques lignes le résumé de la conférence
d’André Comte-Sponville…
Samuel Huntington, il y a quelques années, prédisait
qu’après avoir connu successivement l’ère
des conflits Est-Ouest, puis l’ère des conflits Nord
–Sud, nous entrions dans celle des conflits de civilisations
: en clair celle de l’opposition entre civilisation occidentale,
judéo-chrétienne, et civilisation arabo-musulmane.
Si des occidentaux pouvaient facilement choisir le camp du Sud,
aujourd’hui, et surtout après le 11 septembre , comment
choisir son camp ? surtout si on fait partie de ceux qui affirment
que toutes les cultures se valent…
Pour sortir de ce désarroi, il faut assumer la thèse
qui affirme que toutes les civilisations (ou cultures, les termes
ici sont employés comme synonymes) ne sont pas égales
, et il ne faut pas confondre égalité des hommes
et égalité des civilisations ! Pour cela, on ne
peut adopter la posture des sciences de l’homme, qui par
nécessité s’abstient de jugement de valeur.
De leur point de vue objectif, les différentes civilisations
ne « valent » rien, « toutes se valent »
. Adopter ce point de vue conduirait au nihilisme : tout se vaut,
rien ne vaut…
Du point de vue subjectif, en revanche, la réponse est
à la fois plus intéressante et plus compliquée.
Comparer des civilisations mène à un relativisme
qu’il faut assumer car toutes les civilisations ne sont
pas égales. Du point de vue historique, des faits d’abord:
nul ne conteste la supériorité en leurs temps des
civilisations égyptiennes ou gréco-romaines…Il
a existé des civilisations supérieures aux autres
dans le passé, pourquoi pas aujourd’hui ? Mais aussi
du point de vue du droit, de la logique : si on défend
les droits de l’homme, on ne peut alors proclamer que toutes
les civilisations se valent !
Or ce qui est supérieur aujourd’hui, ce n’est
pas comme le prétend Huntington, la civilisation judéo-chrétienne
mais la culture démocratique, concept bien plus pertinent
du fait des brassages humains associés à la mondialisation
qui mélange sur un même territoire des hommes aux
religions différentes. Il se crée en effet une civilisation
mondiale, laïque, démocratique, respectueuse des droits
de l’homme contre laquelle se liguent bien des résistances.
Elle a ses grandes figures mondiales : Gandhi, Mandela, Martin
Luther King, le Dalaï Lama, les étudiants chinois…
Nous n’avons pas besoin d’inventer de nouvelles valeurs.
Les grandes religions du 6ème siècle av.J.-C. disent
toutes que la sincérité vaut mieux que le mensonge,
le courage que la lâcheté, la douceur que la violence,
l’amour que la haine ou l’égoïsme…Nous
n’avons pas besoin de nouvelles valeurs mais d’une
nouvelle fidélité à ces valeurs que nous
avons reçues et que nous devons transmettre à notre
tour. Cette fidélité est la vraie antidote à
la barbarie. Et nous pouvons le faire sans avoir besoin de croire
en Dieu…
Ce nouvel humanisme doit être conscient de ses limites.
La morale est humaine, donc elle peut évoluer. Les jeunes
d’aujourd’hui sont à la fois plus tolérants
sur les choix de vie, de morale sexuelle et plus sévères
face à la pédophilie, le viol, c'est-à-dire
lorsque la conduite des uns porte atteinte à la personne
de l’autre, fait du mal à l’autre. Ce qui est
mal aujourd’hui, c’est ce qui fait du mal et non plus
ce qui est interdit. Nous sommes passés d’une morale
transcendante à une morale immanente. Un humanisme conscient
des limites de la démocratie aussi . Il y a des institutions
où le pouvoir n’est pas à prendre : c’est
le cas de la famille, ou de l’école. Parents ou enseignants
doivent continuer à dire le droit… Enfin la richesse
ne suffit pas à faire une civilisation. Tout n’est
pas à vendre. Si le marché est le meilleur des systèmes
économiques, produit le plus de richesses au moindre coût
social, historique et humain, on a aussi besoin d’un Etat
pour s’occuper de tout ce qui n’est pas à vendre,
c'est-à-dire l’essentiel…
Commentaire
personnel
J’ai beaucoup apprécié la clarté de
l’exposé de ce grand intellectuel qui a su se mettre
à la portée de tous . Il traite d’un sujet
qui concerne chacun d’entre nous, il me semble. Car nous
sommes confrontés à des évènements
dans le monde où nos jugements sont mis à rude épreuve,
surtout lorsque nous les confrontons en famille ou en classe,
avec des adolescents…
Mais je suis un peu déçue par sa conclusion, un
peu trop consensuelle, il me semble. Nous pouvons certes adhérer
à des grandes valeurs d’amour, de courage, de sincérité…
Mais lors qu’il y a conflit entre les valeurs, lesquelles
choisir? Comment les hiérarchiser? Quelle est la place
de la liberté dans cet ensemble ? Autant de questions qui
mériteraient d’autres conférences…
Marie-Anne AMAR
Prof.
de Sciences Economiques et Sociales au lycée de Sèvres
Sèvres, le 14 février 2005
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